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L’AVENIR DU GAZ ET LES DÉFIS DE LA DÉCARBONATION MOBILISENT LES PROFESSIONNELS DE LA MAINTENANCE AUX INTERRÉGIONALES SYNASAV 2023

Avec plus de 400 participants réunis sur 4 journées, les professionnels de la maintenance et leurs partenaires démontrent leur capacité à se mobiliser autour de leur syndicat pour débattre des sujets de fond qui impactent ou impacteront le fonctionnement de leurs entreprises.

Alors que le gouvernement distille de manière de plus en plus insistante des messages laissant envisager une fin probable du gaz dans l’habitat existant, quel est le moral des troupes au sein des entreprises de maintenance ? Comment se projettent les chefs d’entreprises ? Comment le SYNASAV envisage-t-il lui-même l’avenir ?

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Avec plus de 400 participants réunis sur 4 journées, les professionnels de la maintenance et leurs partenaires démontrent leur capacité à se mobiliser autour de leur syndicat pour débattre des sujets de fond qui impactent ou impacteront le fonctionnement de leurs entreprises

Alors que le gouvernement distille de manière de plus en plus insistante des messages laissant envisager une fin probable du gaz dans l’habitat existant, quel est le moral des troupes au sein des entreprises de maintenance ? Comment se projettent les chefs d’entreprises ? Comment le SYNASAV envisage-t-il lui-même l’avenir ?

Roland BOUQUET, Président du SYNASAV :

« Avant toute chose, je suis très fier de voir une telle mobilisation des professionnels de la maintenance réunis autour du SYNASAV, pour débattre sur des sujets de fond comme les impacts de la politique énergétique gouvernementale sur nos activités, les enjeux de la décarbonation pour l’entreprise, l’évolution de nos modèles économique, etc.

Pour bien porter la parole d’une profession, il faut d’abord savoir l’écouter. C’est le premier objectif de ces interrégionales. C’est devenu une tradition, chaque année, élus et dirigeants du SYNASAV nous partons à la rencontre des chefs d’entreprise.

Quel bilan tirer de ces interrégionales SYNASAV 2023 ?

Au vu de l’importante participation, on sent une profession et des professionnels mobilisés, engagés et déterminés.

Nous le savons tous, que ce soit dans notre vie de tous les jours, comme dans la vie de nos entreprises, la lutte pour la décarbonation peut remettre en cause ce que nous considérions comme acquis.

Si l’on peut ressentir une certaine inquiétude chez les chefs d’entreprises, en particulier sur le rythme effréné auquel le gouvernement semble vouloir nous imposer le changement, je note surtout une volonté de nos adhérents de prise de hauteur pour prendre les bonnes décisions au bon moment.

L’essentiel des débats a porté sur de nombreux sujets. Les principaux : la stratégie énergétique du gouvernement, les écueils du tout électrique, la précarisation énergétique des clients, la complémentarité des solutions techniques et des énergies. L’absence de cohérence et de pérennité des aides aux investissements. Le manque de concertation préalable aux décisions gouvernementale. Le manque de transparence sur les réelles intentions du gouvernement. »

Cyril RADICI, Directeur général du SYNASAV :

« L’entreprise est vivante. Sans verser dans l’anthropomorphisme, on peut tout de même considérer au regard des lois de l’évolution chères à Darwin, que ce ne sont pas forcément les entreprises les plus fortes qui survivent, mais celles qui s’adaptent le mieux. Et pour pouvoir s’adapter, elles doivent pouvoir anticiper. La clef de l’anticipation c’est de pouvoir disposer de la bonne information au bon moment et du temps nécessaire à la mise en œuvre.

Actuellement, ce qui ressort de nos débats, c’est un chef d’entreprise qui joue à un jeu dont les règles évoluent à mesure que la partie se déroule. Quand il commence la partie, certaines cartent qu’il considérait à raison comme des atouts et des points forts, peuvent perdre du jour au lendemain, tout ou partie de leur valeur. Dans ces conditions, pas évident de survivre à la partie.

Concrètement, et pour illustrer le propos, suite à nos échanges de janvier et février avec la DGEC (Direction générale de l'énergie et du climat) et la DGE (Direction générale des Entreprises), il apparaît que la question de la « chasse au gaz » dans l’habitat existant (individuel et collectif) serait sur le plan de travail du gouvernement.

Attention de ne pas tomber dans le dogmatisme énergétique. Au regard des défis qui s’imposent à nous, on ne peut pas se priver de solutions qui peuvent apparaître peu vertueuses dans certaines conditions, mais totalement pertinentes dans d’autres. Sans négliger l’hybridation des systèmes.

Est-il possible d’installer des PAC partout ? Est-ce la solution à tous les maux ? Bien évidemment que non. Est-ce une bonne technologie ? Bien évidemment que oui ! Et c’est même la meilleure dans bon nombre de situations. Mais comme toutes solutions, elle a ses avantages et ses défauts.

Je m’explique. Avec plus de 38 000 interventions quotidiennes, nos chefs d’entreprises mesurent concrètement, de façon très précise, les retours d’expériences des différents types de solutions installées, leurs évolutions dans le temps, l’avis des utilisateurs. Nous disposons donc d’un formidable observatoire de la consommation d’énergie dans les logements en restant l’un des derniers professionnels à franchir le seuil de la porte des logements.

Précarisation des bénéficiaires de la PAC à 1

Sur l’ensemble de nos interrégionales, nos adhérents ont signalé les difficultés répétées de bénéficiaires de la PAC à 1 €, à pouvoir prendre en charge les réparations de leur installation en cas de panne. Non entretenue, une PAC peut rapidement tomber en panne (sous 2 à 3 ans) engendrant des coûts de réparation dépassant rapidement le millier d’euros. On nous signale la multiplication des devis sans-suite et les impayés. On constate donc une dérive inquiétante pour une catégorie de la population alors qu’elle est la plus fragile. Pour nous, représentants des professionnels de la maintenance, l’accès à un habitat digne pour chacun est une clause non négociable.

Alors attention à ne pas précariser ces personnes. Qui plus es dans un contexte inflationniste qui pourrait laisser penser que de s’abstenir faire entretenir sa PAC serait une économie alors que c’est tout l’inverse.

Nous estimons que seulement 15 à 20 % des PAC sont entretenues.

L’obligation d’entretien annuel de ce type d’équipement devrait être une priorité du gouvernement, si n’est par respect pour l’argent public mobilisé pour financer l’équipement, à tout le moins pour permettre au bénéficiaire de se protéger de pannes majeures à court terme. En l’accompagnant de mesures incitatives (type chèque entretien services pour les bénéficiaires des aides) tout le monde s’y retrouverait, y compris la planète.

Le passage à une obligation d’entretien annuel des PAC (actuellement l’entretien obligatoire est bisannuelle) est une recommandation formulée et portée par le SYNASAV auprès des pouvoirs publics. Une étude récente menée par le SYNASAV démontre qu’une PAC non entretenue a une surconsommation de plus de 20% (8 à 12% pour les chaudières) dès la deuxième année (sans parler de l’impact sur la durée de vie de l’appareil). »

Roland BOUQUET, Président du SYNASAV :

« Nos adhérents nous ont également partagé leur incompréhension au sujet de la chaudière THPE (Très haute performance énergétique).

Compte tenu de ses performances, de sa facilité d’installation et de réparabilité, de sa durabilité (20 ans en moyenne pour la THPE, 15 ans pour une PAC), pourquoi faire peser une menace sur la chaudière THPE aujourd’hui via une menace sur le « gaz fossile » ?

Je tiens à rappeler qu’une chaudière THPE est compatible au « gaz vert ». Nous lançons d’ailleurs une grande campagne d’information auprès des détenteurs de THPE, pour leur rappeler que leur appareil peut fonctionner indifféremment au « gaz vert » comme au « gaz fossile ». L’appareil en lui-même est totalement vertueux quand on l’alimente en énergie vertueuse.

Où est la cohérence des aides dans le temps pour des clients qui auront bénéficiés d’aides il y a 4 ou 5 ans pour remplacer leur chaudière basse température par une THPE et qui pourraient la remplacer demain par une PAC à 1€ alors même que le bénéfice de l’amortissement des équipements n’est pas atteint ?

2050 c’est dans un peu plus de 25 ans et 2030 c’est dans 7 ans. Alors donnons nous du temps et des objectifs intermédiaires atteignables et raisonnables.

Sur le terrain, on estime que près de 6 millions d’appareils sont encore des basses température (BT). Quand on sait que de passer d’une BT à une THPE c’est 20 à 30% de consommation en mois (chiffres ADEME). C’est autant de carbone en moins libéré dans l’atmosphère.

Si à cela on ajoute que de faire entretenir sa chaudière chaque année c’est 8 à 12 % de consommation en moins, c’est à nouveau autant de carbone en moins libéré. Quand on sait que près de 2 millions de chaudières ne sont pas entretenues, à elles seules c’est un potentiel d’économie de consommation possible de l’ordre de 1,4 À 2,1 TWh.

Tous les professionnels et tous nos industriels partenaires sont d’accords sur le sujet. Il faut avancer à bon pas pour atteindre nos objectifs de décarbonation à l’horizon 2050, mais pas trop vite. Et la THPE est une parfaite solution de transition progressive de nos modèles économiques et énergétiques permettant aisément de réduire drastiquement notre bilan carbone.

Le sujet du pas de temps est très souvent revenu dans les débats. Si le tempo de la politique ne s’harmonise pas avec le tempo de l’entreprise, vous aurez beau jouer la même partition, ça sonnera faux ! On peut comprendre les impératifs politiques mais le temps économique ne doit pas s’apprécier à la durée des mandats électifs.

Nous avons notamment alerté les pouvoirs publics sur la question des compétences des techniciens. Majoritairement nos équipes techniques sont formées sur l’hydraulique et l’électricité pour être en capacité d’intervenir sur les chaudières. La pompe à chaleur c’est une autre technologie : la thermodynamique. Cela signifie qu’il faut anticiper une bascule progressive des compétences d’une technologie à une autre.

Nous avons fait une étude en interne sur le sujet. Pour pouvoir basculer un technicien d’une technologie à une autre c’est un coût pour l’entreprise d’environ 10 000 par technicien en intégrant le coût et le temps de formation technique (connaissances et formation fabricants), les équipements de mesures etc.

Ce n’est pas tout, pour des raisons de poids et de taille des équipements, l’entreprise devra changer de types de véhicules et résoudre des problèmes de logistique (disponibilité et stockage des pièces).

Le temps d’intervention pour une maintenance est beaucoup plus long pour une PAC. Là où un technicien pouvait faire 7 à 8 visites d’entretien par jour pour une chaudière, nous sommes plus sur une base de 4 équipements entretenus par jour par technicien. Sur le plan habilitation et travail administratif, la gestion des fluides frigorigène est un vrai sujet impactant l’organisation de l’entreprise.

Il est également important de rappeler que pour former un bon dépanneur (compte tenu de son travail d’investigation) nécessite près de 5 ans pour le monter en compétences et en expériences pour qu’il soit en parfaite autonomie.

Pour une entreprise uniquement spécialisée sur les chaudières, et en considérant ce que je viens de vous dire, vous pouvez aisément imaginer que de basculer progressivement sur les PAC c’est un sacré défi. Ce n’est pas impossible, mais il faut du temps.

D’après les infos en provenance de nos adhérents, on estime qu’environ 15% des techniciens de nos entreprises sont passés de la chaudière à la PAC.

Le SYNASAV appelle les pouvoirs publics à une très grande vigilance sur le volet formation des techniciens. Nous avons toujours besoin de former et de recruter sur le dépannage et la maintenance des chaudières. ATTENTION à ne pas déstabiliser nos filières de formation. Avec plus de 12 millions d’appareils gaz, tout ne va pas basculer d’un extrême à un autre. Et qui sait avec la montée en puissance du gaz vert et des chaudières biomasse, n’allons pas fermer des classes qui ont encore de l’avenir. »

Cyril RADICI, Directeur général du SYNASAV :

« J’ajouterai qu’il faut bien prendre garde de ne pas focaliser toute l’attention sur le générateur, pour ne pas négliger les actions de fond à mener sur les 5,2 millions de « passoires énergétiques » sur un parc de 30 millions de résidences principales (+8 % par rapport à 2018, selon une étude de l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE)). Un chiffre qui est même porté à 7,2 millions si l’on tient compte de l’ensemble du parc existant (résidences secondaires et logements vacants). N’oublions que la plus décarbonée des énergies c’est celle qui n’est pas consommée.

Attention à toujours considérer la possibilité qu’une énergie peut en remplacer une autre et qu’il est essentiel de parler de gaz au pluriel pour distinguer le « gaz fossile » du « gaz vert ». Il en est de même pour l’électricité (dont 8,6% est produite par le recours à des énergies fossiles.). N’oublions pas non plus le bois qui a toute sa place dans bien des cas de figure dans la mesure où la filière parviendra à tempérer les spéculations sur la matière première.

Je conclurais en rappelant que nous demeurons force de proposition pour fournir aux pouvoirs publics tous les éléments et arguments nécessaires à la réelle prise en compte des effets et répercussions envisageables de leurs décisions. Nous ne sommes pas dans l’opposition mais dans la co-construction, tant que les objectifs gouvernementaux resteront compatibles avec le développement des entreprises que nous représentons : tous systèmes, toutes énergies, tous types d’habitats. »